À l’occasion de la conférence Sorcière qui es-tu ? qui aura lieu le samedi 21 janvier dans le cadre de La Nuit de la lecture, nous avons choisi, aujourd'hui, de braquer les projecteurs sur... les sorcières.

La figure de la sorcière n’a jamais été aussi revendiquée qu’à l’époque moderne : en réalité, tout est affaire de réappropriation d’un mythe largement déprécié et diabolisé. De la créature maléfique, souvent mises en marge d’une société dont elle n’épousait pas les codes, vivant dans une forme de marginalité, et représentant donc un danger pour l’ordre social et moral, elles deviennent une icône féministe, une figure. En effet, détentrices d’un « savoir occulte » qui se transmettait de femme en femme – et qui concernait essentiellement la fertilité, les accouchements, la pharmacopée des plantes –, ces « bonnes femmes » sont accusées d’avoir vendu leur âme au Diable en échange de ces connaissances.


L’imaginaire collectif les a dépeintes comme de vieilles femmes terrifiantes au nez crochu, affairées autour de chaudrons fumant d’un liquide visqueux ou fendant les airs avec leur balai magique, mais la réalité est beaucoup plus prosaïque. L’histoire de la représentation change en même temps que l’imaginaire collectif se développe et se politise, et les courants féministes investissent dans des représentations qui touchent à la fois les thèmes de l’écologie, de la sexualité, de la médecine, etc.

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Représentation de la sorcière au cinéma et à la télévision


L’évolution de la sorcière au cinéma et à la télévision est, à ce titre, représentative.

En 1937 et en 1939, sortent, respectivement sur les écrans américains, Blanche-Neige et les sept nains et Le Magicien d’Oz. Si le film des studios Disney reprend l’archétype propre aux contes de fées de la sorcière en tant que mauvaise mère, le long métrage de Victor Fleming symbolise son antagoniste différemment.

Les aventures de Dorothy, dans le roman comme dans son adaptation cinématographique, se déroulent en période de Grande Dépression. Le double personnage d’Almira Guich et de la Méchante sorcière de l’Ouest représente ici la domination économique. Menaçant la jeune héroïne, incarnant, elle, le peuple américain, d’expulser de leurs terres son oncle et sa tante, l’acariâtre voisine est une évidente métaphore du capitalisme. À sa peau verte et son chapeau pointu, s’oppose l’image en négatif de Glinda, la bonne sorcière du Nord.

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L’image de la bonne sorcière a, sans doute, été popularisée grâce à la série télévision des années 60 : Ma sorcière bien aimée. Représentation d’une vie de famille idéalisée de la classe moyenne américaine de l’époque, ce soap opera suit les aventures de Samantha, une jeune sorcière, épouse et femme au foyer. Afin de satisfaire son mari, elle promet de ne pas utiliser ses pouvoirs magiques ou tout du moins de les utiliser avec discrétion et parcimonie.

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Ici, la sorcière est donc gentille car elle reste sous le joug du patriarcat. Il est à ce titre frappant de comparer les représentations de la douce Samantha et de sa mère, Endora. Costume excentrique, maquillage outrancier, assumant pleinement son statut de sorcière, ce personnage multiplie les plans machiavéliques contre son gendre, se désespérant de voir la situation de sa fille.

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Il faudra attendre une vingtaine d’années, pour que la sorcière des banlieues pavillonnaires américaines puisse réellement s’assumer en prenant pleine possession de ses pouvoirs avec Les Sorcières d’Eastwick. L'émancipation reste, cependant timide : les trois héroïnes sont en quête de compagnons et c'est au contact du personnage de Jack Nicholson que leurs natures profondes se révèlent.

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Endora comme les soeurs incarnées par Cher, Michelle Pfeiffer et Susan Sarandon vivent seules. Séparée pour l’une, célibataires pour les autres, ces caractérisations de personnages renvoient directement aux origines historiques de la sorcière, qui selon l’historien Jules Michelet, est une femme solitaire car quittée par son mari parti à la guerre. Ce statut de marginalité semble ainsi traverser les siècles...

C’est vers la fin des années 90 et à partir des années 2000, que les sorcières du petit et du grand écran sont enfin représentées comme des femmes fortes et indépendantes. Buffy contre les vampires, le reboot de la série Les Nouvelles aventures de Sabrina, Harry Potter avec le personnage d’Hermione ou bien même Maléfique vont considérablement changer l’image de la sorcière, en apportant au public un regard neuf et positif.

 

Pour aller plus loin :

La médiathèque vous propose une sélection d’ouvrages cinématographiques afin de saisir tout le panel de représentations possibles, allant de la méchante sorcière clichée du Magicien d’Oz aux nouvelles versions s’inscrivant dans le champ de la pop culture.

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