La 7ème édition du festival Les Elles de Noisy met, comme chaque année, à l’honneur les femmes. À la médiathèque, nous avons choisi de braquer les projecteurs sur des femmes engagées et inspirantes qui s’illustrent dans la littérature et la musique.

Littérature

Douze femmes puissantes, apôtres du féminisme et de la liberté, chacune à sa manière, d’un bout du siècle à l’autre, cherche un avenir, une maison, l’amour, un père perdu, une mère absente, une identité, un genre – il, elle, iel – une existence et, au passage le bonheur.


Douze récits s’entremêlent, se répondent, riment et raisonnent. Douze vies s’épaulent et s’opposent. Chacune des douze est en quête et en conquête, de place, de classe, de traces, d’elle-même, des autres, de cet autrui en elle qui a déjà traversé maintes frontières, et a le front de vouloir encore exploser celles qui restent.


« L’ “autre ” du titre peut être interprété de multiples façons. Il pourrait signifier que les femmes sont rendues autres dans certaines situations, du seul fait d’être des femmes, ou que certaines d’entre elles sont considérées comme autres parce qu’elles sont des femmes de couleur, ou queer/trans, ou prolétaires, ou immigrantes.» - Bernardine Evaristo

 


Bernardine Evaristo PhotoC’est le 8ème livre de Bernardine Evaristo, écrivaine et universitaire britannique et nigériane. Elle est professeure d'écriture créative à l'université Brunel et présidente de la Royal Society of Literature (2022-2026), mais aussi essayiste et romancière. Fille, femme, autre est le premier de ses romans traduit en français – merci le Booker Prize. Ce roman est une plongée en apnée dans une partie de la société britannique d’aujourd’hui, la « diaspora africaine », une partie bouillonnante, rugissante, drôle, triste, follement proche. C’est toute la réussite du roman : il présente 12 portraits de femmes afro-britanniques dont le parcours et les ambitions sont profondément façonnés par les origines familiales ou la couleur de peau, mais aussi par les peurs, les réussites et les rêves.


Evaristo est la première écrivaine noire à emporter le Booker Prize (et premier écrivain noir aussi…). Elle est l'auteure de huit romans et ouvrages poétiques qui explorent divers aspects de la diaspora africaine. Elle expérimente notamment la forme et la perspective narrative, fusionnant souvent le passé et le présent, la fiction et la poésie. Elle publie également des critiques littéraires dans le Guardian. Elle prône l’inclusion des écrivains et artistes de couleur et a mis en place une série de projets : elle a notamment fondé le prix international Brunel de la poésie africaine en 2012 et présidé en 2012 le jury du prix Caine et le prix de la nouvelle du Commonwealth.


Fin septembre 2020, la romancière a présenté un véritable manifeste appelant à la création d’une scène littéraire ouverte et inclusive, loin « des patriarches de longue date, et de leurs complices », et qui « donne la parole à tous ceux qui sont absents et silencieux dans les romans ». Son appel a été publié dans le New Statesman une semaine après une enquête qui a beaucoup fait parler d’elle dans les milieux éducatifs : il en ressortait que, dans un pays aussi multiculturel et métissé que le Royaume-Uni, aucun roman écrit par un auteur noir ne figure dans le principal corpus de littérature anglaise que les lycéens britanniques doivent lire pour obtenir le GCSE, le certificat de fin d’études secondaires.


Venez retrouver à la médiathèque son titre Fille, femme, autre, et son nouveau roman qui vient de paraître : Des racines blondes.

Musique

Agnes Obel2 Sentrum Scene 20205 croppedEn 2010, sortait le premier album d’une autrice-compositrice-interprète répondant au nom d’Agnes Obel.  Cette artiste danoise née de parents musiciens  baigne dès l’enfance dans les univers de Chopin, de Satie et de Debussy. Ces influences classiques transparaissent subtilement au travers de Philharmonics, le disque pop qui lance sa carrière. Seule au piano ou accompagnée d’un quatuor à cordes, Agnes Obel fait entendre des ballades délicates et mélancoliques. Le minimalisme de l’instrumentation conjugué à des mélodies entêtantes font connaitre la musicienne sur la scène internationale.

3 ans plus tard, paraît Aventine qui prolonge voire approfondit ces atmosphères feutrées et rêveuses. Les pépites se succèdent telle que l’entêtante Dorian ou la bouleversante Fuel to fire (entendue récemment dans la série à succès The last of us).

Si elle compose seule, la nuit, dans son studio berlinois, Agnès Obel s’entoure de musiciennes pour ces concerts. Des artistes qui viennent toutes de la scène classique, un monde bien plus égalitaire que celui de de la variété quant à la répartition homme / femme.

 La preuve en vidéo dans cette captation de The curse, l’un des plus beaux morceaux d’Aventine, qui tire sa rythmique du violon en mode "col legno" (le bois de l’archet frappant les cordes).

 

Ces deux premiers albums définissent l’univers et le style singulier de la compositrice danoise, le célèbre réalisateur David Lynch ira jusqu’à remixer certains de ces morceaux.

Elle élargit la formule piano/cordes/voix en apportant des arrangements plus électroniques dans son opus suivant….

Appelé Citizen of Glass, il prend sa source dans Le Citoyen de verre de Wolfgang  Sofsky : un essai à propos d’un citoyen dont le corps et la vie sont connus de tous. L’époque contemporaine saturée d’écrans de verre qui servent autant à informer les individus qu’à les surveiller ou les exposer inspire Agnes Obel. Cette conception bouleversée de la réalité et de l’intimité va, ainsi, traverser en filigrane tout le disque.

Pour traduire ces concepts de transparence et de verre en motifs sonores, la musicienne va faire entrer clavecin, mellotron, épinette, célesta et autres synthés dans son univers.

En 2016, sort le premier single Familiar  qui trouble les auditeurs. Lors du refrain, Agnes Obel modifie sa voix en la "pitchant", en abaissant la hauteur du son vers les graves pour la rendre plus masculine. Ce duo avec elle-même poursuit ainsi ce questionnement de l’identité.

 

Suivra Myopia, album qui approfondit ces traitements de voix et ce croisement de l’électronique et de l’acoustique dans une atmosphère toujours plus nocturne et rêveuse. Il est signé, étonnamment pour un disque pop, chez Deutch grammophone, le célèbre label de musique classique !

En 4 albums et en 10 ans, cette artiste aura réussi à imposer son style singulier dans le monde de la musique.

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mia portrait blogÀ mille lieues de l’univers mélancolique et éthéré d’Agnes Obel, la musique de M.I.A est frontale et ouvertement politique.

Née en 1975, cette fille d’un révolutionnaire tamoul indépendantiste voit sa famille fuir la guerre civile du Sri Lanka pour s’exiler en Inde puis à Londres.

Ce début de vie mouvementé va profondément influencer Maya Arulpragasam qui va afficher des prises de positions fortes et engagées tout au long de sa carrière artistique…

Après des études aux Beaux-arts de Londres, la jeune femme met un pied dans le monde musical et sort, en 2005, son premier album Arular sous le pseudonyme de M.I.A. Ce disque la fait apparaitre sur la scène new rave anglaise. Ce genre musical des années 2000 fusionne des éléments de rock, hip-hop, électro, funk et développe une esthétique fluorescente où les néons et lumières psychédéliques sont extrêmement répandus.

Devenue égérie de ce courant, M.I.A sort, deux ans plus tard l’album Kala. Alors qu’elle éprouve des difficultés à entrer aux Etats-Unis, elle décide, en réponse, d’enregistrer son album aux quatre coins du monde : en Inde, en Jamaïque, en Australie et au Libéria.

Combinant hip-hop, dance et musiques du monde  le disque, sorti en 2007, devient un immense succès grâce, notamment, au tube Paper Planes entendu dans le fameux film de Danny Boyle : Slumdog Millionaire.

Chants d’enfants, cliquetis d’arme, bruits de tiroir-caisse et sample des Clashs parsèment le morceau qui évoque la vie personnelle de l’artiste et les problèmes d’immigration.

 

Partageant avec la sphère du Hip-Hop, la culture du détournement, du collage et de l’emprunt, cette artiste crée une musique qui, sous des oripeaux pop et accessibles, traduit ses engagements profonds.  Les albums qui suivront, Maya, Matangi, A.I.M et Mata garderont toujours ce vernis politique. La preuve en est ce clip incroyable réalisé par Romain Gavras en 2012 pour la chanson Bad Girls. Dans un univers frimeur, la chanteuse rappelle qu’en Arabie Saoudite, les femmes n’ont toujours pas le droit de conduire non accompagnées...

 

 

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Les Elles de Noisy

Les Elles de Noisy et la projection des Culottées sont l'occasion pour la médiathèque de revenir sur le statut des autrices, et à fortiori des autrices de BD.

Le début de l'année 2020 fut marqué par la disparition de Claire Bretécher, une autrice importante dans l’histoire de la bande dessinée, dont la célébration en son temps a posé question au Festival de la Bande Dessinée d’Angoulême, car elle a obtenu un Grand Prix différent de ses collègues masculins. Elle est restée la grande figure qui servait de « comparatif » pour qualifier le travail d’autres autrices, jusqu’il y a peu. Désormais, Pénélope Bagieu, surtout depuis Les Culottées, est devenue une figure majeure de la bande dessinée française et féministe et a offert la visibilité à des dizaines d’autres autrices tout autant talentueuses.

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Découvrez les expositions, représentations, animations, ateliers et conférences au programme des Elles de Noisy !

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